Les luttes à Bure

Quelques ressources
Récapitulatif de la situation sur place

Ce week-end a pour vocation de remettre en question le nucléaire dans son ensemble – mais s’il prend place ici, c’est parce que le monde du nucléaire s’y implante, concrètement, depuis plus de vingt ans, par le biais du projet CIGEO.

CIGEO signifie Centre Industriel de stockage Géologique. C’est  un  projet  massif  d’enfouissement  de  déchets  nucléaires  via  des  galeries  souterraines. 

Il  est porté par l’ANDRA, l’Agence Nationale de gestion des Déchets Radioactifs.

A la fin des années 90, plusieurs régions étaient en compétition pour l’accueillir, et c’est ce territoire, frontalier entre la Meuse et la Haute-Marne, qui a gagné (youpi), sans qu’il n’y ait consultation des habitant.es.  Le  labo  s’est  implanté  progressivement,  notamment  par  le  rachat  de  terres  agricoles (et/ou en proposant des baux précaires, renouvelables tant que les occupant·es ne manifestent pas d’opposition au projet) et des hectares de forêts.

Le site, lui, sort de terre en 1998. Aujourd’hui, l’ANDRA c’est :

  • environ 2000 hectares de terres agricoles et 1000 hectares de forêts
  • projets dans plusieurs villages alentours, par exemple à Joinville avec la laverie nucléaire (aka : laver des vêtements radioactifs directement dans la rivière du coin)
  • sur le site lui-même, une « écothèque » (un musée de la nature), un hôtel-restaurant, des bâtiments d’archives EDF et Areva, une supérette-boulangerie, un projet de station essence…

Peu peuplé et économiquement sinistré, le territoire a semblé idéal pour contourner l’opposition de la population.

Et pourtant… depuis vingt ans, la lutte s’y organise, vit, et se renouvelle :

  • 2004-2005 : achat des terres de la Maison de la Résistance, et de la Gare de Luméville, foyers de la lutte.
  • En  2016,  l’ANDRA  lance  ses  travaux  de  galeries  dans  le  Bois  Lejuc,  provoquant  une  forte mobilisation. Le Bois est occupé plusieurs semaines avant une première expulsion, et le 1er août, le mur  construit  par  le  laboratoire  pour  y  empêcher  l’accès  est  déclaré  illégal  par  le  tribunal d’instruction de Bar-le-Duc. Il sera détruit le 15, et à la suite de cette victoire juridique, le Bois sera réoccupé, jusqu’au 22 février 2018.

Les  activités  se  multiplient  sur  le  terrain,  mais  les  dispositifs  de  répression  aussi.  Les  premières 3 perquisitions  à  la  Maison  de  la  Résistance,  et  un  départ  de  feu  provoqué  dans  le  hall  de  l’hôtel- restaurant du site en 2017, signent le début d’une période de nombreuses mises en examen, procès, condamnations, et de surveillance rapprochée.

Le 23 juin 2018 une enquête est ouverte pour « association de malfaiteurs ». Celle-ci  accorde  à  la  gendarmerie  de  larges  moyens  d’investigation.  La  surveillance  quotidienne s’exprime par des rondes dans les villages où résident les opposant-es, des vérifications d’identité aléatoires, de circulations d’hélicoptères, avions et drones, qui filment et prennent des photos, des interdictions de voir certaines personnes ou d’aller à certains endroits… Cette militarisation du territoire est largement dénoncée.

Tu peux lire à ce sujet l’article de Reporterre « La Ligue des droits de l’Homme dénonce le harcèlement des opposants au site de déchets nucléaires de Bure » (L. Lavocat, 20.06.19)

Quoi qu’il en soit, à Bure et dans la région, on lutte toujours. Sur place, pour l’instant, il n’y a pas de déchets  nucléaires  et  pas  de  galeries  construites.  L’autorisation  pour  lancer  les  travaux  continue d’être repoussée, l’étude d’impact environnemental nécessaire bloquée, et le projet en lui-même n’est toujours pas autorisé. Tout cela  a un coût pour l’ANDRA, et  l’argent représente un enjeu énorme pour une industrie nucléaire déjà moribonde. Conséquences : on observe maintenant sur le territoire un arrêt des travaux sur le Bois, sur la voie ferrée destinée au transport des déchets, et sur les lignes électriques à haute-tension. La lutte porte donc ses fruits, et son dynamisme sur le territoire est précieux. Mais rien n’est gagné  : en  2019-2020,  l’ANDRA prévoit  de  commencer  les  infrastructures  qui  serviront  au  chantier  (par exemple,  les  routes  le  long  de la  voie  ferrée). 

Plus que  jamais, il  est donc  important  de  soutenir l’opposition,  concrètement  mais  aussi  par  des  réflexions  de  fond  sur  le  nucléaire.  Cela  concerne l’ensemble  du  territoire,  ailleurs,  et  le  monde,  depuis  Fukushima  jusqu’à  l’Allemagne.

Par ailleurs, une exposition sur les actions menées autour des voies ferrées et contre les trains CASTOR (servant au transport des déchets radioactifs) est actuellement installée à la Gare de Luméville, n’hésite pas à venir la voir.